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Le mardi 1er avril 2014, nos rhétoriciens de sciences fortes ainsi que les élèves de 7ème ont assisté à une conférence-débat en
l’honneur du Prix Nobel de Physique, obtenu le 8 octobre 2013 par notre compatriote le Professeur émérite François ENGLERT pour
ses travaux en physique des particules élémentaires, publiés en 1964.

La conférencière était Mme Martine Jaminon, docteur en sciences physiques et directrice de la Maison de la Science, Quai Van Beneden. |
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Son exposé était intitulé « De l’atome au boson de Higgs : une balade au coeur de la matière ».
Elle a tout d’abord dressé l’historique des découvertes majeures sur les particules subatomiques. Depuis Mendeleïev et sa classification périodique des éléments chimiques (1869), il a fallu attendre plus d’un siècle pour affiner la connaissance de l’atome. Citons notamment les travaux de
- JJ. Thomson (1897) : mesure de la charge de l’électron, mesure du rapport de sa charge à la masse (e/m) et 1er modèle de l’atome dit modèle du « plum-pudding ».
- E. Rutherford (1902-1911) : il a prouvé que le noyau atomique est chargé positivement et conçu l’expérience mettant en évidence les trois types de rayonnement radioactifs (α, β, γ). Ses travaux ont conduit au modèle planétaire de l’atome qui mettait en défaut le modèle de Thomson.
- L. de Broglie (1922) associe une onde électromagnétique aux électrons gravitant autour du noyau, ce qui jette les bases de la physique quantique.
- E. Rutherford (1919) : découverte du proton au sein du noyau.
- J. Chadwick (1922) : découverte du neutron au sein du noyau. De là, découleront la découverte des isotopes d’un même élément chimique, ne différant donc pas par leur nombre de protons, mais bien par leur nombre de neutrons. Par exemple, le carbone 14 comporte deux neutrons excédentaires par rapport au carbone 12 habituel.
- Yukawa (1935) : mise en évidence d’une interaction nucléaire, c’est-à-dire d’un échange d’une particule appelée méson-pi entre deux neutrons.
- M. Gell-Mann (1964) : Prédiction de l’existence des quarks. Le nucléon (proton ou neutron) n’est plus la plus petite particule élémentaire : il est lui-même composé de 3 particules fondamentales, appelées quarks.
- En 1968, une équipe de physiciens de Stanford confirme l’existence des quarks expérimentalement au SLAC (Centre de l’accélérateur linéaire de Stanford) à l’aide d’un collisionneur de particules de 3,2 km de long. L’existence d’autres particules messagères (ou encore bosons) fut alors prouvée.
On est donc passé des molécules aux quarks en une période de temps relativement courte.
Madame Jaminon a ensuite parlé des dernières découvertes expérimentales réalisées dans le grand collisionneur de particules du CERN (le LHC), qui prouvent enfin l’existence du boson de Brout-Englert-Higgs et confortent donc la théorie du modèle standard (MS) de la physique. Le MS explique l’Univers uniquement à l’aide de quatre types de forces (ou interactions) fondamentales :
- Force forte (nucléaire) : elle s’exerce entre les quarks à l'intérieur des nucléons et donne naissance à l'énergie nucléaire. Elle agit sur une distance de 10-13 cm, elle est 100 fois plus forte que la force électromagnétique et n'agit que sur des particules massives comme le proton et le neutron. Les particules échangées qui témoignent de l’action de la force forte entre quarks sont appelées les gluons.
- Force électromagnétique : bien supérieure à la force de gravité, cette force n'agit que sur les particules chargées, soit positivement comme les protons, soit négativement comme les électrons. Elle forme les atomes en attachant les électrons aux noyaux, mais elle ne s'arrête pas là. Elle soude les atomes en les obligeant à partager leurs électrons pour former les molécules. Elle pousse encore les molécules à se combiner à leur tour en de longues chaînes, la plus haute expression de ces chaînes est l'ADN qui permet la vie. Les particules échangées lorsque cette force se manifeste sont appelés les photons. Il s’agit d’une émission d’onde électromagnétique.
- Force gravitationnelle : découverte au 17ème siècle par Newton, cette force attractive agit sur toutes les masses. C’est la plus faible des quatre forces de la nature, mais aussi celle qui a la plus grande portée, elle agit sur l'ensemble de l'univers, elle est la colle du cosmos. L'intensité de cette force dépend de la masse de l'objet. La particule messagère de ce type de force n’a pas encore été mise en évidence expérimentalement, mais les physiciens sont persuadés qu’elle existe bien et lui ont donné le nom de graviton.
- Force faible (nucléaire) : elle permet aux neutrons de se transformer en protons et vice versa. Lors de la radioactivité β, un neutron se désintègre en donnant naissance à un proton. Un électron et un antineutrino sont alors émis. Bien que plus forte que la gravité, cette force est 1000 fois plus faible que la force électromagnétique. Les particules échangées lors d’une interaction faible regroupent les bosons de jauge Z0, W+ et W-.
Le boson de Brout-Englert-Higgs est donc une particule élémentaire dont l'existence, postulée indépendamment en 1964 par Robert Brout, François Englert et Peter Higgs permet de justifier la brisure de symétrie de l'interaction unifiée électrofaible et d'expliquer pourquoi certaines particules ont une masse alors que d'autres n'en ont pas. Son existence a été confirmée de manière expérimentale en juillet 2012 grâce à l'utilisation du LHC du CERN et a conduit à l'attribution du prix Nobel de physique à François Englert et Peter Higgs en octobre 2013.
Le boson de Higgs confère une masse non nulle aux bosons de jauge de l'interaction faible (bosons W et boson Z). A contrario, le photon de l’interaction électromagnétique est insensible au champ de Higgs car il a une masse nulle.

François Englert (à gauche) et Peter Higgs, au CERN, le 4 Juillet 2012 à l'occasion de l'annonce de la découverte d'un boson de Higgs par les expériences ATLAS et CMS (Image: Maximilien Brice / CERN)
Pour en savoir plus : http://home.web.cern.ch/fr et
http://home.web.cern.ch/fr/about/accelerators/large-hadron-collider
C .THONON, professeure de physique